L'An Mil by Histoire

Auteur:Histoire [Histoire]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 2014-10-09T22:00:00+00:00

III

Les événements politiques de l’an mil en Occident n’ont pas une moindre portée pour l’avenir de l’Europe. Ils présentent un caractère commun : ils éclairent, comme des points lumineux, de larges phénomènes d’expansion et de mouvement. Dans le Nord-Ouest, ces mouvements rappellent les grandes invasions du Ve siècle, ils sont accompagnés de la conversion des Germains maritimes restés encore païens ; dans le Sud la reconquête et l’occidentalisation de l’Espagne procèdent par étapes plus lentes, mais, à partir de cet instant critique, avec une continuité que rien n’interrompra plus. En France, la monarchie capétienne commence, selon une technique féodale, le travail séculaire d’unité qu’elle doit poursuivre contre les féodaux. L’Allemagne enfin esquisse, d’accord avec un grand pape, un rêve d’empire universel qui commence et qui finit comme un roman, en plein irréalisme.

Portons d’abord nos regards vers ces régions de l’Atlantique Nord, d’où sont venus à l’Europe continentale et aux Îles Britanniques tant d’inquiétudes et de désastres au cours du IXe siècle avec les incursions normandes. À cette première vague viking en succède une seconde, d’une ampleur formidable, au cours du siècle suivant. Elle donne aux Danois l’empire dans la Baltique et l’étend bientôt à l’Angleterre. De Harald Dent Bleue à Svend et de Svend à Canut, il y a progression sans arrêt. Dans la seconde moitié du Xe siècle, on dirait que les Danois sont partout : cent ans plus tôt (859), nous les rencontrons au cœur de la Navarre, à Pampelune, et en bien d’autres lieux ; sous Harald (950-986), ils fondent cette puissance à la fois stable et mouvante qui, appuyée sur des bases maritimes arrachées à la faiblesse des rois saxons d’Angleterre et à l’anarchie des chefs irlandais, tient à la gorge ces formations politiques peu cohérentes. Une ceinture d’établissements danois occupant de nombreux ports, de petites et de moyennes îles, les embouchures des fleuves, paralyse l’activité ou en partage les profits. Ce sont des bases pour la guerre et la piraterie, en attendant de devenir des entrepôts de commerce. Plus que le besoin de vendre leurs poissons et leurs épées de fer, l’instinct d’un nomadisme marin, la rage de brûler, de tuer et de voler poussaient au loin ces cruels navigateurs. Mais, de même qu’ils étaient passés de la période des raids à celle des établissements fixes, ils passaient à présent d’un statut morcelé, d’une organisation de chefs de bandes et de petits rois de la mer, dispersés sur un espace immense, à la fondation d’une sorte d’empire. Il est remarquable d’ailleurs que leur apparente grandeur coïncide avec leur déclin et que leur attachement à la possession du sol neutralise leur élan…

Le christianisme cheminait chez les Danois depuis le milieu du Xe siècle. Le 2 janvier 948, le pape Agapit II rattache à Hambourg comme métropole trois évêchés danois récents, ceux de Schleswig, de Ribe, d’Aarhus. Nous ne connaissons pas la date de la conversion d’Harald. Il est certain qu’il fut baptisé, ainsi que sa femme Gunhild et son fils Svend. Il bâtit la cathédrale de Roskilde, dédiée à la Trinité.

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